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Steve ProulxÇa y est, le moment est venu de faire mon coming out. Je suis animateur scout. Ne riez pas! C’est sérieux. Chaque mercredi soir, j’enfile ma chemise verte de scout, je noue mon foulard de scout, je boucle ma ceinture de scout et je me rends au local des scouts où m’attendent 18 louveteaux de 9 à 11 ans.
Je fais cela bénévolement parce que j’aime les enfants. Voir grandir ces petits bouts de personnes m’emplit d’une joie profonde. À l’âge « louveteau », les plus jeunes émergent à peine de la tendre enfance, bariolée de fantaisie, alors que les plus vieux préparent tranquillement leur entrée officielle dans l’adolescence. Au cours des trois années où ils feront partie de ma meute, ces jeunes garçons prendront quelques centimètres, acquerront de la maturité et de l’autonomie et commenceront à voir le monde d’un oeil nouveau. En m’engageant dans le scoutisme, je voulais voir s’écrire sous mes yeux cet épisode béni du grand récit de l’enfance.
J’aurais pu être entraîneur d’une jeune équipe sportive, ou donner un quelconque cours de dessin en perspective ou de poterie. Mais pour moi, le scoutisme représentait une activité complète. Pourquoi complète? Elle n’est d’abord nullement associée à l’acquisition de compétences précises, que ce soit en violon, en patinage artistique ou en ballet-jazz. Il y a bien sûr une progression de l’enfant, mais celle-ci est liée au développement de la personne, sur le plan physique, intellectuel, affectif, social et moral. Complète, que je vous disais. Ainsi, un jeu donné fera bouger les petits loups (physique), tout en favorisant la collaboration et le travail d’équipe (social). Lors d’un camp, la vue d’un ciel étoilé deviendra le prétexte pour discuter de l’existentiel sujet de la place de l’humain dans l’univers (moral)... Et tout ce cheminement se fait dans un cadre autre que celui de l’école, dans une atmosphère empreinte de traditions (inspirées du Livre de la jungle, chez les louveteaux), dans une optique de respect, de partage, d’initiative et de débrouillardise.
Il y a bien sûr la dimension religieuse. Cet aspect pourrait en refroidir quelques-uns, moi le premier. Cependant, chez les scouts, l’expression d’une foi catholique se fait toujours dans le respect des croyances de chacun. Un jeune musulman, bouddhiste ou raélien ne sera jamais exclu d’un groupe et personne n’est tenu de participer aux prières ou bénédicité.
« Ask the boy! »
Mais l’essence même du scoutisme tient en une phrase, célèbre, prononcée par le père du mouvement, Lord Baden-Powell. « Ask the boy! » (Demandez au garçon). En disant cela, ce bon vieux B.-P. avait eu une idée géniale, celle voulant que ce soit à travers les responsabilités qu’on lui confie que le jeune se réalisera, acquerra de la confiance en soi et apprendra à connaître ses forces autant que ses faiblesses. Ask the boy, c’est la pierre d’assise de la pédagogie scoute. Qu’il s’agisse de n’importe quelle activité au sein du groupe, les jeunes doivent la choisir, la préparer, la réaliser, l’évaluer et la « fêter » (on appelle cela le VCPREF, pour « Voulu, Choisi, Préparé, Réalisé, Évalué, Fêté »). En tant qu’adultes-animateurs, nous ne sommes donc que des guides. Nous écoutons les jeunes, ils nous donnent leurs idées et concrétisent les projets qu’ils ont eux-mêmes élaborés.
Le concept du Ask the boy, qui fait ses preuves depuis près de 100 ans dans le scoutisme, mise donc sur la capacité des enfants de se prendre en main lorsqu’on leur en donne l’occasion. Si la formule fonctionne chaque mercredi dans ma meute, je ne verrais pas pourquoi il en serait autrement dans une famille. Demandez-leur. Plutôt que de dire à un enfant de ranger sa chambre, demandez-lui ce qu’il pourrait faire d’original pour que sa chambre demeure toujours propre? S’il oublie souvent sa tâche hebdomadaire de sortir les poubelles, demandez-lui de trouver une solution-miracle pour s’en souvenir. Demandez-lui des idées pour aider la famille à passer une belle fin de semaine. Bref, Ask the boy, comme disait Baden-Powell...
Voilà donc. J’ai fait mon coming out. Mais soyez sans crainte, dans cette chronique, je ne ferai pas chaque mois l’apologie du scoutisme! Mon implication auprès des jeunes me permettra plutôt de vous parler de mes rencontres, de mes découvertes, de mes réflexions. Bref, de mes incursions au pays des enfants. Je vous invite d’ailleurs à me parler de VOS propres incursions en territoire infantile en m’écrivant à steve@montrealpourenfants.com