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Steve ProulxPour la plupart des jeunes, un vêtement « cool » n'est pas digne de ce nom s'il ne s'appelle pas Nike, Diesel, Fila, Fubu, etc. À cet âge, la mode est presque une question de survie. Si tous ses amis portent des vêtements signés Tommy Hilfiger, il se doit d'en porter lui aussi. De cette façon, il aura la conviction profonde de s'affirmer et d'être VRAIMENT lui-même. Bien sûr, ses amis sont tous habillés comme lui... inutile de lui en parler.
Au cours des dernières décennies, la mode a pris une place prépondérante dans les habitudes de consommation des jeunes. Pour ne pas dire TOUTE la place... Pourquoi la mode est-elle une question de vie ou de mort (!) pour bien des ados ? En tant que parent, comment réagir lorsque son enfant sort ses griffes ? Comment l'aider à ne pas devenir une victime des marques ? Il y a quelques générations seulement, on n'aurait pu écrire sur tel sujet. À l'époque des familles nombreuses, le plus jeune héritait souvent des vêtements du deuxième plus jeune, qui lui, usait déjà les fringues de son grand frère, et ainsi de suite... Dans ce contexte, il n'y avait pas beaucoup de places pour les caprices d'enfants. La situation a changé. Les familles ne comptent désormais qu'un ou deux enfants vers qui est dirigée toute l'attention parentale. Alors qu'auparavant un enfant qui donnait son opinion était presque puni, aujourd'hui, les parents s'intéressent, plus que jamais, aux goûts de leur progéniture. Il est même prouvé que les enfants comptent pour beaucoup dans les choix de biens de consommation de la famille. Mais que les parents fassent des pieds et des mains pour plaire à leurs enfants n'explique qu'une partie de cette popularité pour l'accoutrement cher et signé, si précieux aux yeux des jeunes... D'un autre côté, la publicité y est pour beaucoup.
« Tweens » et apprentis consommateurs
Naomi Klein, auteure du livre No Logo, s'étend longuement sur cet intérêt marqué des créateurs de marques pour le marché des jeunes. Elle écrit : «[...] 1992 fut la première année depuis 1975 où le nombre d'adolescents a augmenté en Amérique. Graduellement, une idée émergea au sein des secteurs manufacturiers et du divertissement [...] ce n'était pas le temps de vendre du Tide et du Snuggle aux ménagères, mais plutôt de mettre l'accent sur MTV, Nike, Hilfiger, Microsoft, Netscape et Wired. » Il faut comprendre qu'à cette même époque, les grandes compagnies voyaient leurs revenus dégringoler, depuis que les baby-boomers vieillissants approchaient de la retraite et économisaient pour leurs vieux jours. Il n'en fallait pas davantage pour que cette nouvelle génération d'apprentis consommateurs devienne la cible parfaite pour les Gap, Nike, Hilfiger et autres Adidas.
Mais le « jeune » n'est pas une cible assez raffinée pour les publicitaires, comme l'explique Claude Cossette, dans son livre La publicité : Déchêt culturel « En réalité, le publicitaire considère désormais qu'il existe six segments de marchés différents chez les jeunes : nouveaux-nés jusqu'à deux ans ; les 3-5 ans ; les 6-8 ans ; les 9-12 ans appelés « les tweens » ; les 13-15 ans et les 16-18 ans. » C'est dire combien la jeunesse a changé en quelques années seulement : de « simple marmaille » ils sont devenus « segments de marchés » ! Les « tweens » sont particulièrement intéressants. Contraction entre « between » et « teen », le terme désigne les jeunes entre 9 et 12 ans. Les « tweens » forment le groupe démographique le plus important des 20 dernières années, en Amérique du Nord.
Quelques chiffres : en 1999, ils étaient 2,5 millions au Canada et dépensaient près de 1,6 milliard de dollars. Malgré leurs jolies joues rouges et leur air innocent, les « tweens » ont un poids qu'aucun publicitaire ne peut ignorer. Les changements au sein des familles et un matraquage incessant de publicités font que les jeunes d'aujourd'hui sont des rois, et qu'ils n'exigent rien de moins qu'une paire de souliers Nike, avec des ressorts dans les semelles... Des exigences qui ont un prix... élevé !
Le rôle des parents
Bien sûr, il est moins dangereux pour un jeune de vouer un culte à une marque que de succomber à la cigarette ou à l'alcool. Mais un problème se pose souvent : les vêtements signés sont dispendieux et peuvent rapidement faire éclater le budget de la rentrée scolaire. Quel rôle peut jouer le parent pour éviter que son enfant ne devienne une victime des marques ? Il ne faut jamais oublier que le parent est avant tout un modèle. Dès son plus jeune âge, les comportements de l'enfant évoluent en fonction de son entourage. Considérant ceci, les parents devraient informer leurs enfants quant aux critères qui ont influencé l'achat d'un vêtement : on achète tel chandail parce qu'il est chaud et confortable, tel pantalon parce qu'il est résistant, etc.
Au début de l'adolescence, le jeune commence à s'affirmer. Il veut décider des vêtements qu'il portera et ses influences proviennent souvent des marques, de la musique qu'il écoute, de son cercle d'amis, etc. C'est une période difficile pour les parents qui s'inquiètent souvent des excès de leurs jeunes. C'est le bon âge pour commencer à allouer un montant d'argent fixe à son adolescent ou mieux, l'aider à se trouver un petit d'emploi.
Le jeune doit apprendre la valeur de l'argent et commencer à consommer de façon intelligente, en fonction de ses besoins... et de ses avoirs ! L'idée n'est pas d'empêcher l'enfant d'acheter des vêtements Diesel ou Hilfiger, mais bien de lui apprendre à choisir un vêtement pour les bonnes raisons. Et surtout, les parents ne devraient jamais succomber à la tentation de lui donner plus d'argent ! Même si cela peut sembler excessif, plusieurs parents font souvent l'erreur de déroger à des règles qu'ils ont eux-mêmes mises en place. Encadrer un jeune et mettre en place des balises précises (qui sont respectées) ne rime pas nécessairement avec « dictature parentale » ! Il y a des façons de faire qui ne font que renforcer ce lien de confiance et de respect qui règne entre parents et ados...